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Saint John Paul II's Apostolic Visit to Lebanon

10th - 11th May 1997

Pope Saint John Paul II was a pilgrim to Lebanon in 1997, visiting Beirut on his 77th apostolic journey.

Saturday 10th May - after the welcome ceremony, Pape St Jean Paul II met with young people at the Basilica of Our Lady of Lebanon, Harissa, where he signed the post-synodal Apostolic Exhortation on A New Hope for Lebanon.
Sunday 11th May - Papa San Giovanni Paolo II celebrated Holy Mass, followed by the recitation of the Regina Caeli and a meeting with the Patriarchs & Bishops ahead of the departure ceremony from Beirut. (The Holy Father spoke in French.)

Discours du Saint-Père Jean Paul II à la Cérémonie de Bienvenue
L'aéroport de Beyrouth, samedi 10 mai 1997 - also in English, Italian, Portuguese & Spanish

"Msr le Président, Msr le Cardinal, Béatitudes, Excellences, Mesdames, Messieurs,
Je remercie tout d'abord Msr le Président de la République des paroles cordiales de bienvenue qu'il vient de m'adresser au nom de tous les Libanais et je suis particulièrement sensible à l'accueil qui m'est réservé en cette circonstance mémorable.

Ma gratitude va aussi aux plus hautes Autorités de l'Etat, en particulier à Son Excellence Msr le Président du Parlement et Son Excellence Msr le Président du Conseil des Ministres. Je sais gré de leur accueil chaleureux aux Patriarches et aux Evêques catholiques, ainsi qu'aux autres Chefs religieux chrétiens, musulmans et druze, aux Autorités civiles et militaires, et à tous les amis libanais. Je salue les fils et les filles de cette terre qui ont tenu à s'associer à cette cérémonie par la radio ou par la télévision.

Allah iuberekum! ― (Que Dieu vous bénisse!).

2. Comment ne pas rappeler d'abord l'escale que le Pape Paul VI avait voulu faire à Beyrouth, le 2 décembre 1964, en se rendant à Bombay? Il manifestait ainsi son attention spéciale à l'égard du Liban, montrant que le Saint-Siège estime et aime cette terre et ses habitants. Aujourd'hui, c'est avec une grande émotion que j'ai embrassé la terre libanaise, en signe d'amitié et de respect. Je viens chez vous, chers Libanais, comme un ami qui vient rendre visite à un peuple et qu'il veut soutenir dans sa marche quotidienne. C'est en ami du Liban que je viens encourager les fils et les filles de cette terre d'accueil, ce pays d'antique tradition spirituelle et culturelle, soucieux d'indépendance et de liberté. Au seuil du troisième millénaire, le Liban, tout en conservant ses richesses spécifiques et en restant lui-même, doit être en mesure de s'ouvrir aux réalités nouvelles de la société moderne et de prendre toute sa place dans le concert des nations.

3. Tout au long des années de guerre, avec toute l'Eglise, j'ai suivi attentivement les moments difficiles traversés par le peuple libanais et je me suis associé par la prière aux souffrances qu'il endurait. En de nombreuses circonstances, dès le début de mon pontificat, j'ai alerté la Communauté internationale, pour qu'elle aide les Libanais à retrouver la paix, au sein d'un territoire national reconnu et respecté par tous, et pour qu'elle favorise la reconstruction d'une société de justice et de fraternité. A juger humainement, de nombreuses personnes sont mortes en vain à cause des conflits. Des familles ont été disloquées. Des Libanais ont dû s'exiler loin de leur patrie. Des personnes de culture et de religion différentes, qui vivaient en bonne entente et en bon voisinage, se sont trouvées séparées, voire durement opposées.

Cette période, qui a heureusement pris fin, demeure présente dans toutes les mémoires et laisse de nombreuses blessures dans les cœurs. Cependant, le Liban est appelé à se tourner résolument vers l'avenir, librement déterminé par le choix de ses habitants. Dans cet esprit, je voudrais rendre hommage aux fils et aux filles de cette terre qui, dans les périodes troublées que je viens d'évoquer, ont donné l'exemple de la solidarité, de la fraternité, du pardon et de la charité, au risque même de leur vie. Je salue en particulier l'attitude de nombreuses femmes, et parmi elles des mères de famille, qui ont été des ferments d'unité, des éducatrices à la paix et à la convivialité, et d'inlassables partenaires du dialogue entre les groupes humains et entre les générations.

4. Désormais, chacun est invité à s'engager en faveur de la paix, de la réconciliation et de la vie fraternelle, en posant à son niveau des gestes de pardon et en travaillant au service de la communauté nationale, afin que plus jamais la violence ne l'emporte sur le dialogue, la peur et la méfiance sur la confiance, le ressentiment sur l'amour fraternel.

Dans ce nouveau Liban que vous rebâtissez peu à peu, il importe de donner une place à chaque citoyen, en particulier à ceux qui, habités par un légitime sentiment patriotique, désirent s'engager dans l'action politique ou dans la vie économique. De ce point de vue, la condition préalable à toute pratique réellement démocratique est le juste équilibre entre les forces vives de la nation, selon le principe de subsidiarité qui appelle une participation et une responsabilité de chacun dans les décisions. D'autre part, la gestion de la res publica repose sur le dialogue et sur le compromis, non pour faire prévaloir des intérêts particuliers ou encore pour maintenir des privilèges, mais pour que l'action soit un service des frères, indépendamment des différences culturelles ou religieuses.

5. Le 12 juin 1991, j'avais annoncé la convocation de l'Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Evêques. Après de nombreuses étapes de réflexion et de partage au sein de l'Eglise catholique au Liban, elle s'est réunie en novembre et décembre 1995. Aujourd'hui, je suis venu chez vous pour célébrer solennellement la phase conclusive de l'Assemblée synodale. J'apporte aux catholiques, aux chrétiens des autres Eglises et Communautés ecclésiales, et à tous les hommes de bonne volonté, les fruits des travaux des évêques, enrichis par des dialogues cordiaux avec les délégués fraternels: l'Exhortation apostolique post-synodale Une espérance nouvelle pour le Liban. Ce document, que je signerai ce soir en présence des jeunes, n'est pas une conclusion ni un point final à la démarche entreprise. Bien au contraire, il est une invitation à tous les Libanais, pour qu'ils ouvrent avec confiance une page nouvelle de leur histoire. Il est la contribution de l'Eglise universelle à une plus grande unité dans l'Eglise catholique au Liban, au dépassement des divisions entre les différentes Eglises et au développement du pays, auquel tous les Libanais sont appelés à participer.

6. Arrivant pour la première fois sur le sol du Liban, je tiens à vous redire, Monsieur le Président de la République, combien je vous suis reconnaissant pour votre accueil. Je forme des vœux chaleureux pour votre personne et pour votre mission auprès de vos compatriotes. A travers vous, j'adresse mes salutations cordiales à tous les citoyens libanais. Avec eux tous, je prie pour le Liban, afin qu'il soit tel que le veut le Très-Haut.

Allah iuberekum! ― (Que Dieu vous bénisse!)"

Homelie du Saint-Père Jean Paul II lors d'une rencontre avec des Jeunes
Basilique de Notre-Dame du Liban, Harissa, samedi 10 mai 1997 - also in English, Italian, Portuguese & Spanish

"Chers Jeunes du Liban,
1. Je suis particulièrement heureux de vous rencontrer ce soir, au cours de mon voyage apostolique dans votre pays. Je remercie tout d'abord le Cardinal Nasrallah Pierre Sfeir, Patriarche d'Antioche des Maronites, pour ses paroles de bienvenue, ainsi que Mgr Habib Bacha, Président de la Commission épiscopale pour l'Apostolat des Laïcs, pour sa présentation de la jeunesse du Liban.

Chers jeunes, je suis particulièrement sensible aux paroles que, par l'intermédiaire de vos représentants, vous allez de m'adresser avec franchise et confiance. Je comprends les aspirations qui vous animent et vos impatiences devant la situation quotidienne qui vous semble ne pas pouvoir changer. Je découvre ainsi les visages de garçons et de filles, qui, avec toute l'ardeur et l'élan de leur jeunesse, ont cependant le désir profond de se tourner vers l'avenir, en priant le Seigneur de leur donner force et courage, de leur communiquer son amour et son espérance, comme nous allons le demander dans la prière d'ouverture de notre célébration. Tout au long des années passées, je vous ai soutenus par la prière, demandant au Christ de vous assister dans votre marche vers la paix et dans votre vie personnelle et sociale.

2. Nous allons entendre le récit évangélique des disciples d'Emmaüs. Leur expérience peut vous aider, car elle ressemble à celle de chacun d'entre vous. Attristés par les événements de la Semaine sainte, désorientés par la mort de Jésus et déçus qu'ils ne réalisent pas leurs attentes, les deux disciples décident de quitter Jérusalem le jour de Pâques et de retourner dans leur village. L'espérance apportée par le Christ au cours des trois années passées avec Lui sur la Terre Sainte semble avoir été anéantie avec sa mort. Cependant, tout en marchant sur la route, les pèlerins d'Emmaüs se rappellent le message du Seigneur, message d'amour et de charité fraternelle, message d'espérance et de salut. Ils gardent dans leur cœur le souvenir des faits et gestes qu'il avait accomplis au long de sa vie publique, des bords du Jourdain au Golgotha, en passant par Tyr et par Sidon.

Chacun d'eux se souvient de paroles et de rencontres avec le Seigneur, qui manifestait sa tendresse, sa compassion et son amour à l'égard de tout être humain. Tous étaient frappés par son enseignement et par sa bonté. Au-delà de la souillure du péché, le Christ regardait la beauté intérieure de l'être créé à l'image de Dieu. Il savait percevoir le désir profond de vérité et la soif de bonheur qui habitent l'âme de chaque personne. Par son regard, sa main tendue et sa parole de réconfort, Jésus appelait chacun à se relever après la faute, car toute personne a une valeur qui dépasse ce qu'elle a fait et il n'y a pas de péché qui ne puisse être pardonné. En se remémorant tout cela, les disciples commencent ainsi à méditer la Bonne Nouvelle apportée par le Messie.

Au cours de leur marche sur la route d'Emmaüs, alors qu'ils contemplaient la personne du Christ, sa parole et sa vie, les disciples sont rejoints par le Ressuscité lui-même, qui leur dévoile la profondeur des Ecritures et leur fait découvrir le dessein de Dieu. Les événements de Jérusalem, la mort sur la Croix et la résurrection, apportent le salut à tout homme. La mort a été vaincue, le chemin de la vie éternelle est définitivement ouvert. Mais les deux hommes ne reconnaissent pas encore le Seigneur. Leur cœur est obscurci et troublé. Ce n'est qu'au terme de la route, lorsque Jésus leur partage le pain, lorsqu'il refait le geste de la Cène, mémorial de son sacrifice, que leurs yeux s'ouvrent pour accueillir la vérité: Jésus est ressuscité; il les précède sur les chemins du monde. L'espérance n'est pas morte. Aussitôt, ils retournent à Jérusalem annoncer la Bonne Nouvelle. Fort de ces promesses, nous savons nous aussi que le Christ est vivant et réellement présent au milieu de ses frères, tous les jours et jusqu'à la fin des temps.

3. Le Christ refait sans cesse cette marche d'Emmaüs, cette marche synodale avec son Eglise; en effet, le mot synode veut dire faire route ensemble. Il l'a refaite avec les pasteurs de l'Eglise catholique au Liban, au cours de l'Assemblée spéciale qui s'est tenue à Rome en novembre et en décembre 1995. Chers jeunes, il veut aussi la refaire avec vous, parce que le synode des évêques pour le Liban était fait pour vous: l'avenir, c'est vous. Lorsque vous accomplissez votre tâche quotidienne, dans l'étude ou le travail, lorsque vous servez vos frères, lorsque vous partagez vos doutes et vos espérances, lorsque vous méditez l'Ecriture, seul ou en Eglise, lorsque vous participez à l'Eucharistie, le Christ vous rejoint; il chemine à vos côtés; il est votre force, votre nourriture et votre lumière.

Chers jeunes, dans votre vie de tous les jours, n'ayez pas peur de vous laisser rejoindre par le Christ à l'image des disciples d'Emmaüs. Dans votre vie personnelle, dans la vie ecclésiale, le Seigneur vous accompagne et met en vous son espérance. Le Christ a confiance en vous, pour être responsables de votre propre existence et de celle de vos frères et sœurs, de l'avenir de l'Eglise au Liban et de l'avenir de votre pays. Aujourd'hui et demain, Jésus vous invite à quitter vos sentiers, pour faire route avec Lui, unis avec tous les fidèles de l'Eglise catholique et avec tout le peuple libanais.

4. Alors acceptez-vous de suivre le Christ? Si vous acceptez de suivre le Christ et de vous laisser saisir par lui, il vous montrera que le mystère de sa mort et de sa résurrection est la clé de lecture par excellence de la vie chrétienne et de la vie humaine. En effet, dans toute existence, il y a des temps où Dieu semble faire silence comme dans la nuit du Jeudi saint; des temps de détresse comme le jour du Vendredi saint où Dieu semble abandonner ceux qu'il aime; des temps de lumière comme à l'aube du matin de Pâques qui a vu la victoire définitive de la vie sur la mort. A l'exemple du Christ qui a remis sa vie entre les mains du Père, c'est en mettant votre confiance en Dieu que vous ferez de grandes choses. Car, si nous comptons uniquement sur nous-mêmes, nos projets font trop souvent apparaître des intérêts particuliers et partisans. Mais tout peut changer lorsque l'on compte d'abord sur le Seigneur, qui vient transformer, purifier et pacifier l'être intérieur. Les changements auxquels vous aspirez sur votre terre nécessitent d'abord et avant tout des changements dans les cœurs.

5. En effet, il vous appartient de faire tomber les murs qui ont pu s'édifier pendant les périodes douloureuses de l'histoire de votre nation; n'élevez pas de nouveaux murs au sein de votre pays. Au contraire, il vous revient de construire des ponts entre les personnes, entre les familles et entre les différentes communautés. Dans votre vie quotidienne, puissiez-vous poser des gestes de réconciliation, pour passer de la méfiance à la confiance! Il vous revient aussi de veiller à ce que chaque Libanais, en particulier chaque jeune, puisse participer à la vie sociale, dans la maison commune. Ainsi naîtra une nouvelle fraternité et se tisseront des liens solides, car pour l'édification du Liban, l'arme principale et déterminante est celle de l'amour. En puisant dans la vie intime avec le Seigneur, source de l'amour et de la paix, vous serez à votre tour des artisans de paix et d'amour. A cela, nous dit l'Apôtre, nous serons reconnus comme ses disciples.

Vous êtes la richesse du Liban, vous qui avez soif de paix et de fraternité, et qui avez le désir de vous engager chaque jour pour cette terre à laquelle vous êtes profondément attachés. Avec vos parents, vos éducateurs et tous les adultes qui ont des fonctions sociales et ecclésiales, vous avez à préparer le Liban de demain, pour en faire un peuple uni, avec sa diversité culturelle et spirituelle. Le Liban est un héritage plein de promesses. Attachez-vous à acquérir une solide éducation civique et morale, pour prendre pleinement conscience de vos responsabilités dans la reconstruction nationale. Parmi les éléments qui créent l'unité au sein d'une nation, il y a le sens du dialogue avec tous ses frères, dans le respect des sensibilités spécifiques et des différentes histoires communautaires. Loin d'éloigner les personnes les unes des autres, cette attitude fondamentale d'ouverture est un des éléments moraux essentiels de la vie démocratique et un des moyens essentiels du développement des solidarités, pour recomposer le tissu social et pour donner un nouvel élan à la vie nationale.

6. Pour vous manifester mon estime et ma confiance, dans un instant à la fin de l'homélie, je signerai devant vous l'Exhortation apostolique post-synodale. Par vos réflexions, vous avez apporté une contribution notable à la préparation de l'Assemblée, où vous avez été représentés et entendus. Aujourd'hui, je vous choisis comme témoins privilégiés et comme dépositaires du message de renouveau dont l'Eglise et votre pays ont besoin. Je vous exhorte à prendre avec ardeur une part active à la mise en œuvre des orientations de l'Assemblée synodale. Avec les patriarches et les évêques, pasteurs du troupeau, avec les prêtres, les religieux et les religieuses, et l'ensemble du peuple chrétien, vous avez la charge d'être les témoins du Ressuscité, par la parole et par toute votre vie. Dans la communauté chrétienne, chacun de vous est appelé à avoir une part de sa responsabilité. En écoutant le Christ qui vous appelle et qui veut faire réussir votre existence, vous répondrez à votre vocation particulière, dans le sacerdoce, la vie consacrée ou le mariage. Dans chaque état de vie, s'engager à suivre le Seigneur est source de grande joie.

L'église dans laquelle nous sommes se trouve au sommet de la montagne: elle est visible pour les habitants de Beyrouth et de la région, et pour les visiteurs qui arrivent sur votre terre; ainsi, que votre témoignage soit pour vos compagnons un exemple éclairant! N'oubliez pas votre identité chrétienne et votre condition de disciples du Seigneur. C'est votre gloire; c'est votre espérance; c'est votre mission. Recevez l'Exhortation comme un don que l'Eglise universelle fait à l'Eglise au Liban et à votre pays, avec la certitude que votre dynamisme et votre courage seront à l'origine de transformations profondes en vous et dans l'ensemble de la société. Mettez votre foi et votre espérance dans le Christ. En lui, vous ne serez pas déçus.

7. Demandons à la Vierge Marie, Notre-Dame du Liban, de veiller sur votre pays et sur ses habitants, et de vous assister de sa tendresse maternelle, pour être les dignes héritiers des saints de votre terre et pour faire refleurir le Liban, ce pays qui fait partie des Lieux saints que Dieu aime, parce qu'il est venu y faire sa demeure et nous rappeler que nous avons à construire la cité terrestre, en ayant les yeux fixés sur les valeurs du Royaume.

Alors, je dois vous dire que vous avez suivi le discours avec attention. Et je dois vous dire que je vous ai suivis aussi: est-ce qu'ils réagissent au moment juste? Est-ce qu'ils applaudisent quand il faut applaudir? Alors, j'ai constaté tout cela. Comme ça votre examen est réussi! Et maintenant on doit retourner dans la basilique, dans l'église pour célébrer la partie liturgique. Vous devez encore y participer et à la fin je reviendrai ici vous voir!"

Homelie du Pape St Jean Paul II à la Sainte Messe
en conclusion de l'Assemblée Spécial pour le Liban du Synode des Évêques
Esplanade de la base navale, Beyrouth, dimanche 11 mai 1997 - also in English, Italian, Portuguese & Spanish

"1. Aujourd'hui, je salue le Liban. Depuis longtemps, je désirais venir, et pour tant de raisons! J'arrive dans votre pays seulement en ce jour, pour conclure l'Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Evêques. Il y a près de deux ans, l'Assemblée synodale a mené ses travaux à Rome. Mais sa partie solennelle, la publication du document post-synodal, a lieu maintenant, au Liban. Ces circonstances me permettent d'être sur votre terre, pour la première fois, et de vous dire l'amour que l'Eglise et le Siège apostolique portent à votre nation, à tous les Libanais: les catholiques des différents rites maronite, melkite, arménien, chaldéen, syrien, latin, les fidèles appartenant aux autres Eglises chrétiennes, ainsi que les musulmans et les druzes, qui croient au Dieu unique. Du fond du cœur, je vous salue tous, en cette circonstance si importante. Nous voulons maintenant présenter à Dieu les fruits du Synode pour le Liban.

Je remercie Monsieur le Cardinal Nasrallah Pierre Sfeir, Patriarche maronite, pour les paroles d'accueil qu'il m'a adressées en votre nom à tous. Je remercie aussi les Cardinaux qui m'accompagnent; ils soulignent par leur présence l'attachement du Siège apostolique au Liban. Je salue les Patriarches et les Evêques présents, ainsi que toutes les personnes qui ont pris part aux travaux du Synode pour le Liban.

C'est pour moi une joie de saluer les distingués représentants des autres Eglises et Communautés ecclésiales, les Patriarches et notamment les délégués fraternels au Synode, qui ont bien voulu s'associer à cette fête de leurs frères catholiques. J'adresse aussi aux personnalités musulmanes et druzes un très cordial salut.

Avec déférence, j'exprime ma gratitude à Son Excellence le Président de la République, à Son Excellence le Président du Parlement, à Son Excellence le Président du Conseil des Ministres, ainsi qu'aux Autorités de l'Etat pour leur présence à cette célébration liturgique.

2. Dans cette assemblée exceptionnelle, nous voulons dire au monde l'importance du Liban, sa mission historique, accomplie au long des siècles: pays de nombreuses confessions religieuses, il a montré que ces différentes confessions peuvent vivre ensemble dans la paix, la fraternité et la collaboration; il a montré que l'on peut respecter le droit de tout homme à la liberté religieuse; que tous sont unis dans l'amour pour cette patrie qui a mûri au cours des siècles, gardant l'héritage spirituel de leurs pères, notamment du moine saint Maron.

3. Nous sommes ici dans la région que foulèrent les pieds du Christ, Sauveur du monde, il y a deux mille ans. La sainte Ecriture nous apprend que Jésus alla prêcher au-delà des limites de la Palestine d'alors, qu'il visita aussi le territoire des dix cités de la Décapole, Tyr et Sidon en particulier et qu'il y accomplit des miracles. Libanais et Libanaises, le Fils de Dieu lui-même fut le premier évangélisateur de vos ancêtres. C'est un privilège extraordinaire. Parlant de Tyr et de Sidon, je ne peux pas omettre de mentionner les grandes souffrances que connaissent leurs populations. Je demande aujourd'hui à Jésus de mettre fin à ces douleurs. Et j'implore de Lui la grâce d'une paix juste et permanente au Moyen-Orient, dans le respect des droits et des aspirations de tous.

En écoutant l'Evangile de ce jour, l'Evangile des huit Béatitudes dans le Sermon sur la Montagne, nous ne pouvons pas oublier que l'écho de ces paroles du salut, prononcées un jour en Galilée, était tôt parvenu jusqu'ici. Les auteurs de l'Ancien Testament se tournaient souvent dans leurs écrits vers les monts du Liban et de l'Hermon, qu'ils voyaient à l'horizon. Le Liban est donc un pays biblique. Se trouvant tout proche des lieux où Jésus accomplit sa mission, il fut parmi les premiers pays à recevoir la Bonne Nouvelle que vos ancêtres ont reçue de la bouche du Sauveur.

Assurément, vos ancêtres ont appris par la prédication apostolique, en particulier par les missions de saint Paul, l'histoire du salut, les événements qui se sont succédé du dimanche des Rameaux au Vendredi saint et au Dimanche de Pâques. Le Christ a été crucifié, mis au tombeau, mais il est ressuscité le troisième jour. Le Mystère pascal de Jésus Christ constitue le cœur même de l'histoire du salut, comme le montre bien, à la Messe, l'acclamation paulinienne après la consécration: « Nous proclamons ta mort, Seigneur Jésus, nous célébrons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire ». Toute l'Eglise attend sa venue, en Orient et en Occident. Les fils et les filles du Liban attendent son nouvel avènement. Nous vivons tous l'Avent des derniers temps de l'histoire et nous cherchons tous à préparer la venue du Christ, à édifier le Règne de Dieu qu'il a annoncé.

4. La première lecture de cette liturgie, dans les Actes des Apôtres, nous rappelle la période qui a suivi l'Ascension du Christ au ciel, lorsque les Apôtres, selon sa recommandation, retournèrent au Cénacle et y demeurèrent en prière, avec la Mère de Jésus et les frères et Soeurs de la communauté primitive qui fut le premier noyau de l'Eglise (cf 1, 12-14). Chaque année, après l'Ascension, l'Eglise revit cette première neuvaine, la neuvaine au Saint-Esprit. Les Apôtres, rassemblés au Cénacle, avec la Mère du Christ, prient pour que s'accomplisse la promesse que leur a faite le Christ ressuscité: «Vous allez recevoir une force, celle du Saint-Esprit, qui viendra sur vous. Alors vous serez mes témoins» (Ac 1, 8). Cette première neuvaine apostolique à l'Esprit Saint est le modèle de ce que fait l'Eglise chaque année.

L'Eglise prie: Veni, Creator Spiritus!
«Viens, ô Esprit créateur! Visite les âmes de tes fidèles; Emplis de la grâce d'en haut les cœurs qui sont tes créatures... »

Je redis avec émotion cette prière de l'Eglise universelle avec vous, chers Frères et Sœurs, fils et filles du Liban. Nous avons confiance: l'Esprit Saint renouvellera le visage de votre terre. « Et renovabis faciem terrae. »

5. Dans la Lettre que nous lisons aujourd'hui, saint Pierre écrit: « Puisque vous communiez aux souffrances du Christ, réjouissez-vous, afin d'être dans la joie et l'allégresse quand sa gloire se révélera. Si l'on vous insulte au nom du Christ, heureux êtes-vous, puisque l'Esprit de gloire, l'Esprit de Dieu, repose sur vous» (1 P 4, 13-14).

On a souvent parlé du « Liban martyr », surtout dans la période de guerre qui a marqué votre pays voici plus de dix ans. Dans ce contexte historique, les paroles de saint Pierre concernent tous ceux qui ont souffert sur cette terre. L'Apôtre écrit: « Puisque vous communiez aux souffrances du Christ, réjouissez-vous », parce que l'Esprit de Dieu repose sur vous, et c'est l'Esprit de gloire (1 P 4, 13-14). Je n'oublie pas que nous sommes rassemblés près du cœur historique de Beyrouth, la Place des Martyrs; mais vous l'avez nommée aussi Place de la Liberté et Place de l'Unité. J'en suis sûr, les souffrances des années passées ne seront pas vaines; elles fortifieront votre liberté et votre unité.

Aujourd'hui, la parole de Jésus inspire notre prière. Nous prions pour que ceux qui pleurent soient consolés, pour que les miséricordieux obtiennent miséricorde (cf Mt 5, 5.7), pour que, recevant le pardon du Père, tous acceptent de pardonner les offenses à leur tour. Prions pour que les fils et les filles de cette terre soient heureux d'être des artisans de paix et d'être appelés fils de Dieu (cf Mt 5, 9). Si, par la souffrance, nous participons à la passion du Christ, nous aurons aussi part à sa gloire.

6. L'Esprit Saint, l'Esprit de Jésus Christ, est un Esprit de gloire. Prions aujourd'hui pour que cette gloire divine enveloppe tous ceux qui connaissent la souffrance sur la terre libanaise. Prions pour qu'elle devienne un germe de force spirituelle pour vous tous, pour l'Eglise et pour la nation, afin que le Liban puisse remplir son rôle au Proche-Orient, parmi les nations voisines et avec toutes les nations du monde.

Esprit de Dieu, mets ta lumière et ton amour dans les cœurs pour achever la réconciliation entre les personnes, au sein des familles, entre voisins, dans les villes et les villages et au sein des institutions de la société civile!

Esprit de Dieu, que ta force réunisse tous les fils de cette terre pour qu'ils marchent ensemble avec courage et ténacité sur le chemin de la paix, de la convivialité, dans le respect mutuel de la dignité et de la liberté des personnes, pour l'épanouissement de chacun et pour le bien du pays tout entier!

Esprit de Dieu, donne aux familles libanaises de développer les dons de grâce du mariage! Donne aux jeunes de bâtir leur personnalité avec confiance et de prendre conscience de leurs responsabilités dans l'Eglise et dans la cité!

Esprit de Dieu, accorde aux fidèles du Liban d'affermir l'unité de chacune des Eglises patriarcales, de toute l'Eglise catholique au Liban! Aide-les à faire de nouveaux pas sur les chemins de la pleine unité de tous ceux qui ont reçu le don de la foi au Christ Sauveur!

Esprit de Dieu, « Toi qu'on appelle Conseiller, Source vive, Feu, Charité », manifeste en ce peuple les fruits attendus de l'Assemblée synodale! Esprit de lumière et d'amour, sois pour les fils et les filles du Liban source de force, de force spirituelle, spécialement à cette heure, au seuil du troisième millénaire du christianisme!

Viens Esprit de Dieu. Veni, Sancte Spiritus! Amen."

Papa San Giovanni Paolo II at the Regina Caeli
Esplanade de la base navale, Beyrouth, Sunday 11th May 1997 - in English, French, Italian & Portuguese & Spanish

"Au terme de cette célébration, à l'heure de la prière mariale, nous invoquons aussi les saints qui ont vécu sur cette terre. Avec vous, je prie saint Maron, saint Charbel et la bienheureuse Rafka. Ma pensée va aussi au vénérable Al-Hardini, que j'espère avoir la joie d'inscrire prochainement au nombre des bienheureux.

Avec vous, je confie à Notre-Dame du Liban tous les fils et les filles du pays. Que la Mère du Seigneur, présente au pied de la Croix et au Cénacle à la Pentecôte, rassemble dans la foi, l'espérance et l'amour ses enfants présents dans le pays ou dispersés dans le monde! Qu'elle assiste vos pasteurs dans leur ministère! Qu'elle soutienne la fidélité dans la prière et le service charitable des moines et des moniales, des religieux et des religieuses! Qu'elle accompagne les laïcs dans leur vie ecclésiale et dans leur service de la société! Qu'elle affermisse les familles dans l'unité de l'amour et dans leur dévouement à leur mission éducative! Qu'elle guide les jeunes sur les chemins de la vie!

Que Marie, dans sa tendresse maternelle, réconforte les plus pauvres, ceux qui souffrent dans leur corps ou dans leur cœur, les prisonniers et les réfugiés! Notre-Dame du Liban, veille sur le peuple tout entier qui vit sur cette terre si éprouvée! Le Successeur de Pierre, venu ici pour porter à tous un message de foi et d'espérance, te le confie. Au seuil du nouveau millénaire, puissions-nous voir se réaliser le message prophétique d'Isaïe: « Encore un peu du temps, très peu de temps, et le Liban se changera en verger, et le verger sera pareil à une grande forêt » (29, 17)!

O Vierge très sainte, accorde à ce peuple d'antique origine mais toujours jeune, de rester le digne héritier de son illustre histoire et de bâtir avec dynamisme son avenir dans le dialogue entre tous, le respect mutuel des groupes différents, la concorde fraternelle!

Reine de la Paix, protège le Liban!
Reine de la Paix, nous te prions, écoute-nous!
Merci pour votre participation si nombreuse, joyeuse et affectueuse.
Que Dieu bénisse le Liban!"

Pope St John Paul II's words at the meeting with Patriarchs and Bishops
Résidence patriarcale maronite de Bkerké, Sunday 11 May 1997 - in English, French, Italian & Portuguese

"On a évoqué beaucoup de personnes. Je voudrais souligner que la conclusion actuelle de l'Assemblée synodale pour le Liban va marquer un pas ultérieur dans le chemin synodal, si l'on peut dire, de ce Synode, pas seulement traditionnel, mais aussi Synode régional. Synode pour le Liban et Synode régional, pas seulement pour le pays, mais un peu pour l'Asie mineure. Et ici, je dois rappeler la personnalité de mon compatriote W. Rubin qui a été le premier prédécesseur du Cardinal Schotte. Je le rappelle d'autant plus que j'étais très lié avec lui. Il a étudié ici, à l'Université Saint-Joseph, et il est toujours resté très lié, très attaché au Liban. J'espère qu'il a bien servi le Synode des Evêques dans cette période décisive, parce que première, et que l'idée synodale gagnera toujours plus de sens, fera un très grand progrès. Cela veut dire que si l'Eglise de Rome n'est pas une Eglise synodale, on attache de plus en plus d'importance, une valeur plus grande au Synode des Evêques. Alors c'est une Eglise synodale dans un sens différent, mais en tous cas une Eglise synodale où le Synode des Evêques joue un rôle important. Cela peut nous rapprocher, je pense, de nos frères orthodoxes. Dans cet esprit, j'attends Vos Béatitudes cet après-midi. On va se rencontrer et parler avec les patriarches orthodoxes qui ont voulu participer à cette solennité et participer aussi au Synode, du moins à travers leurs représentants, et je me réjouis beaucoup de cette rencontre. Merci pour tout."

Discours du Pape Saint Jean Paul II à la Cérémonie de Congé
Aéroport de Beyrouth, dimanche 11 mai 1997 - also in English, Italian & Portuguese & Spanish

"Monsieur le Président de la République,
1. Au terme de ma visite pastorale dans votre pays, vous avez tenu à venir me saluer avec la délicatesse et le sens de l'accueil qui font partie de la tradition libanaise. Je tiens à vous dire à nouveau ma gratitude pour l'accueil que vous m'avez réservé, pour les dispositions qui ont été prises et qui ont facilité le déroulement des différentes rencontres qu'il m'a été donné de vivre.

Mes remerciements s'étendent aux Autorités civiles et militaires, aux responsables des différentes Eglises et Communautés ecclésiales, pour leurs prévenances au cours des deux journées passées dans ce beau pays, si cher à mon cœur. J'exprime aussi ma vive gratitude et ma reconnaissance aux membres des services de sécurité et à tous les bénévoles qui, avec générosité, efficacité et discrétion, ont contribué à la réussite de ma visite.

2. Au cours des célébrations et des différentes entrevues que j'ai pu avoir, j'ai constaté l'amour profond que les catholiques Libanais et tous leurs compatriotes portent à leur patrie et leur attachement à sa culture et à ses traditions. Ils sont restés fidèles à leur terre et à leur patrimoine en de nombreuses circonstances, et ils continuent à manifester la même fidélité aujourd'hui. Je les exhorte à poursuivre dans cette voie, en donnant dans la région et dans le monde un exemple de convivialité entre les cultures et entre les religions, dans une société où toutes les personnes et où les diverses communautés sont considérées à parité.

3. Avant de quitter votre sol, je renouvelle mon appel aux Autorités et au peuple libanais tout entier, pour que se développe un nouvel ordre social, fondé sur les valeurs morales essentielles, avec le souci de garantir la place primordiale de la personne et des groupes humains dans la vie nationale et dans les décisions communautaires; une telle attention à l'homme, qui appartient naturellement à l'âme libanaise, portera des fruits de paix dans le pays et dans la région. J'exhorte les Dirigeants des Nations au respect du droit international, tout particulièrement au Moyen-Orient, pour que soient garanties la souveraineté, l'autonomie légitime et la sécurité des Etats et que soient respectés le droit et les aspirations compréhensibles des peuples. En saluant les efforts de la Communauté internationale dans la région, je souhaite que le processus pour rechercher une paix juste et durable continue à être soutenu avec détermination, courage et cohérence. Je souhaite aussi que les efforts soient poursuivis et intensifiés, afin de soutenir la croissance du pays, la marche des Libanais vers une société toujours plus démocratique, dans une totale indépendance de ses institutions et dans la reconnaissance de ses frontières, conditions indispensables pour garantir son intégrité. Mais rien ne pourra se faire si tous les citoyens du pays ne s'engagent pas, chacun en ce qui le concerne, sur la voie de la justice, de l'équité et de la paix, dans la vie politique, économique et sociale, ainsi que dans le partage des responsabilités au sein de la vie sociale.

4. Je tiens à exprimer à nouveau ma vive gratitude aux Patriarches, aux Evêques libanais, au clergé, aux religieux et religieuses, ainsi qu'aux laïcs de l'Eglise catholique qui ont préparé intensément ma venue. A eux tous, j'ai confié l'Exhortation apostolique post-synodale, pour qu'elle les guide et les soutienne dans leur marche spirituelle et dans leurs engagements aux côtés de leurs frères. Sensible à l'accueil des catholiques libanais, dont j'ai pu apprécier la vitalité pastorale, je voudrais les assurer de mon affection et de ma profonde communion spirituelle, les invitant à être des témoins miséricordieux de l'amour de Dieu et des messagers de paix et de fraternité.

Mon salut respectueux s'adresse aussi aux Chefs des autres Eglises et Communautés ecclésiales, à tous les chrétiens des autres confessions, aux croyants de l'Islam, en souhaitant que tous poursuivent le dialogue religieux et la collaboration, pour manifester que les convictions religieuses sont sources de fraternité et pour témoigner qu'une vie conviviale est possible, par amour pour Dieu, pour ses frères et pour sa patrie.

A travers votre personne, Monsieur le Président, je salue et je remercie tous les Libanais, en leur offrant mes vœux fervents de paix et de prospérité. Que votre nation, dont les montagnes sont comme un phare au bord de la mer, offre aux pays de la région un témoignage de cohésion sociale et de bonne entente entre toutes ses composantes culturelles et religieuses!

En vous renouvelant ma gratitude, j'appelle sur tous vos compatriotes l'abondance des Bénédictions divines."

 

 

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